
De la précarité vers la pauvreté étudiante
Article écrit en collaboration avec la Fédération des Associations Générales Étudiantes – FAGE
Chaque année, le coût de la rentrée universitaire ne cesse d’augmenter, plongeant de plus en plus d’étudiant.es dans une précarité grandissante, voire une véritable pauvreté. En 2024, la situation devient alarmante avec une estimation du coût de la rentrée à 3 157 €, soit une augmentation de 3% par rapport à l’année précédente. La FAGE, pour la 22ème fois, met en lumière l’évolution des dépenses auxquelles les étudiant.es font face, révélant des chiffres inquiétants.
Une rentrée sous le signe de l’augmentation des frais
Alors que près de 20% des étudiant.es ne mangent pas à leur faim, les mesures gouvernementales semblent accentuer les difficultés plutôt que de les alléger. L’accès à l’enseignement supérieur pour les plus précaires se complique, avec une hausse des charges sans revalorisation suffisante des aides sociales. En plus des frais de rentrée, les étudiant.es doivent faire face aux frais de vie courante, ce qui les oblige parfois à rogner sur les dépenses essentielles, l’alimentation devenant ainsi une variable d’ajustement budgétaire.
Entre précarité et frais en explosion
À l’heure où près de 20 % des étudiant.es peinent à se nourrir correctement, les hausses successives des frais de vie, combinées à l’insuffisance des aides sociales, compliquent considérablement l’accès à l’enseignement supérieur pour les plus précaires. En plus des frais de rentrée déjà lourds, les étudiant.es doivent assumer des dépenses quotidiennes de plus en plus élevées, notamment le logement, qui représente souvent la charge la plus importante. Hors Île-de-France, le loyer moyen est de 520 €, tandis qu’il grimpe à 688 € dans la capitale, forçant de nombreux étudiant.es à s’éloigner de leur campus pour trouver des logements plus abordables, ou à se tourner vers le marché privé, où les prix sont encore plus élevés. Cette pression financière pèse lourdement sur leur budget, obligeant certains à faire des sacrifices importants, notamment sur l’alimentation, la santé, et même leur parcours académique. Dans certains cas, le loyer représente jusqu’à 50 % des frais mensuels, laissant peu de marge pour couvrir les autres besoins essentiels, aggravant ainsi la précarité d’une partie croissante de la population étudiante.
Des frais d’inscription en hausse… et plus d’autres
Les frais spécifiques de rentrée ont connu une hausse de 2,9% en 2024, rendant l’accès à l’enseignement supérieur encore plus difficile pour les étudiant.es. Le montant des frais d’inscription s’élève désormais à 175 € pour une licence, 250 € pour un master, et 391 € pour un doctorat. À cela s’ajoute la CVEC, qui est passée de 100 € à 103 €, augmentant encore la pression financière sur les étudiant.es.
Pour certaines filières il y a aussi des coûts additionnels spécifiques. Par exemple, un.e étudiant.e en linguistique doit dépenser en moyenne 118 € pour acquérir ses manuels de grammaire, de littérature, etc. Pour les étudiant.es en odontologie, la situation est encore plus alarmante : ils doivent dépenser en moyenne 980 € pour acquérir leur matériel, incluant des modèles de dents, des tenues spécifiques, et des capteurs. Ces coûts sont d’autant plus difficiles à supporter que certains frais complémentaires et illégaux ont été identifiés, notamment dans les filières d’études dentaires et STAPS.
La précarité alimentaire : un fléau silencieux
Les étudiant.es sont de plus en plus nombreux.ses à devoir sauter des repas pour boucler leur budget. En moyenne, ils et elles sautent plus de trois repas par semaine. Face à l’augmentation du coût de la vie, l’alimentation est devenue la première variable d’ajustement. Certains jeunes sont contraints de choisir entre se salarier pour pouvoir se nourrir, ou se consacrer pleinement à leurs études au risque de souffrir de malnutrition. Cette situation est particulièrement inquiétante, car une alimentation saine est essentielle à la réussite scolaire et au bien-être.
Accès aux loisirs et aux soins : un luxe pour beaucoup
L’accès aux loisirs, qu’il s’agisse de culture ou d’activités physiques, est de plus en plus compromis par la précarité économique. De même, l’accès aux soins devient un luxe que beaucoup d’étudiant.es ne peuvent plus se permettre. La précarité étudiante, accentuée par l’inflation, contraint de nombreux jeunes à renoncer à ces besoins essentiels, avec des conséquences graves sur leur santé physique et mentale.
Les étudiant.es étrangèr.es : des grand.es oublié.es
Pour les étudiant.es étranger.es, la situation est encore plus difficile. Les frais d’inscription sont bien plus élevés, atteignant 2 850 € pour une licence et 3 879 € pour un master, ce qui porte le coût total de la rentrée à plus de 5 800 €. Ces frais, combinés à un accès limité aux bourses et aides sociales, placent les étudiant.es étrangèr.es dans une situation de précarité extrême.
Les défis de l’engagement étudiant
Aujourd’hui, de nombreux étudiants se retrouvent confrontés à des défis majeurs qui limitent leur engagement dans une vie associative et sociale. Les coûts élevés de la vie étudiante forcent beaucoup à jongler entre leurs études et des emplois à temps partiel. Cette surcharge peut non seulement être épuisante, mais aussi réduire le temps disponible pour s’investir dans des activités extrascolaires, des projets associatifs ou des causes qui leur tiennent à cœur.
Il est essentiel de reconnaître que ce manque de temps et cette fatigue ne sont pas simplement des obstacles individuels, mais des barrières à une participation active et épanouissante dans notre société. Cette situation peut entraîner un isolement accru et un sentiment de déconnexion, ce qui accentue le sentiment de précarité.
Pourquoi c’est important ?
L’engagement associatif offre aux jeunes une multitude de bénéfices. Participer à des projets associatifs permet aux étudiants de développer des compétences précieuses telles que le travail d’équipe, la gestion de projets et la communication. Les étudiants engagés dans des associations estiment que cette expérience améliore leur employabilité. Ces engagements favorisent également un sens accru de la responsabilité sociale, permettant d’être plus conscients des enjeux sociétaux. En somme, l’engagement associatif n’est pas seulement une opportunité d’apprendre et de se développer, mais aussi un moyen efficace de renforcer le lien social et de contribuer positivement à la société.
Des mesures urgentes nécessaires
Face à ces défis, la FAGE propose des mesures importantes pour améliorer la situation. Parmi les solutions proposées, on trouve le gel des loyers et charges locatives pour les logements CROUS, la construction accrue de logements étudiants, et une réévaluation des bourses en fonction de l’inflation. Ces actions sont cruciales pour alléger le fardeau financier des étudiants et leur permettre de se concentrer davantage sur leurs engagements personnels et communautaires.
Mais il est également important de souligner les nombreuses initiatives positives mises en place par les associations étudiantes et les organismes de soutien. De nombreux projets, événements et programmes émergent pour aider les étudiants à trouver un équilibre entre leurs études, leur travail et leur vie associative. Ces efforts sont essentiels pour construire une communauté solidaire et dynamique.
La rentrée 2024 est l’occasion de réinventer l’engagement étudiant en mettant en avant des solutions concrètes et en soutenant les initiatives en cours. Continuons de travailler à créer un environnement où chaque étudiant a la possibilité de s’investir pleinement dans les causes qui lui tiennent à cœur, tout en bénéficiant d’un soutien adéquat.
Sources
Dossier de presse. 22e Indicateur du coût de la rentrée. Édition 2024, FAGE. https://www.fage.org/ressources/documents/source/1/8834-DP-22e-me-ICDR-2024-1.pdf
Dossier de presse. Bouge ton CROUS : La consultation étudiante. 2024, FAGE. https://fage.org/ressources/documents/source/1/8464-DP-FAGE-ConsultationCROUS_2024.pdf