Utopia 56 est une association d’intérêt général qui vient en aide aux exilés à la rue grâce à la mobilisation citoyenne en France. Cette association est présente dans plusieurs grandes villes : Calais, Lille, Paris, Rennes et Toulouse. Les activités de la structure ont fortement augmenté suite au confinement lié à la crise du Covid-19 (Coronavirus).
L’association nous a expliqué comment elle a dû s’organiser pendant cette période et nous a également fait part des difficultés qu’elle rencontrait.
Les propos qui suivent ont été recueillis mi avril 2020
Augmentation et changement des besoins suite à la crise
« Dans la rue, les personnes tombent forcément malade car il leur est impossible de respecter le confinement, les gestes barrières, etc. Ces exilés voient leurs conditions de vie s’empirer d’avantage. Par exemple, ils n’ont plus d’alternative hygiénique pour vivre au quotidien comme les toilettes publiques sont fermées.
“Comme les rues sont vides, les invisibles deviennent visibles”
Nous sommes présents dans 5 villes (Calais, Lille, Toulouse, Paris et Rennes) et les évolutions suite à la crise sanitaire y sont assez différentes. »
A Calais, rien n’est fait !
« À Calais, un couvre-feu obligatoire a été instauré à 20h par la sous préfecture. Pour mener à bien leurs missions, nos bénévoles ont dû le braver et se sont vus contraindre de payer des amendes.
Les personnes vivant dans la rue étaient soumises à des conditions qualifiées de survie et, avec cette crise sanitaire, cette situation s’est encore empirée : des démantèlements de camps sont organisés tous les jours nous obligeant à fournir des tentes encore plus régulièrement. Les conditions déjà dures pour les aides humanitaire sont rendues encore plus compliquées…
L’équipe est restreinte afin de limiter les risques d’infection : les maraudes se font désormais à 2 bénévoles lorsqu’ils étaient 5 avant la crise. Mais elles se poursuivent ! Des tentes, désormais individuelles pour diminuer le risque de propagation du virus, sont distribuées, ainsi que du gel hydroalcoolique et des masques lorsque cela est possible. Notre association à Calais compte sur les aides financières récoltées grâce aux collectes en ligne pour pouvoir faire leurs distributions. »
A Paris des changements dans les actions
« Avec la crise sanitaire et le confinement, notre association à Paris a dû s’adapter et effectuer de nombreux changements dans l’organisation de ses missions :
Une nouvelle organisation
- Comme beaucoup d’associations, les équipes sont restreintes afin de diminuer le risque de contamination
- Des maraudes sont organisées toutes les nuits quand, avant la crise, elles étaient plus espacées dans le temps
- Le réseau de logement solidaire a été suspendu et nous devons trouver d’autres alternatives. Par exemple, pendant le confinement, la Paroisse de Paris nous a prêté des salles
Augmentation des personnes à soutenir
- Nous aidons les exilés mais aussi les personnes sans domicile fixe car d’autres associations ont dû se retirer du terrain (manque de moyens, de bénévoles, etc.)
- Nos bénévoles interviennent directement dans des squats car les individus dans le besoins qui venaient avant jusqu’à nous ne se déplacent plus
- Nous devons aider également les travailleurs précaires, les personnes qui travaillent sans être déclarées, désormais sans travail et donc en manque de revenu pour vivre
De nouvelles actions
Nous distribuons désormais des vêtements et de la nourriture, chose que nous ne faisions pas avant la crise. En effet, certaines associations sont contraintes d’arrêter leurs actions et celles continuant les leurs, telle que la nôtre, essayent de compenser ces manquements. Par exemple, Les Resto du Cœur ont des bénévoles majoritairement retraités qui sont donc des personnes fragiles / à risque, et stoppent ou ralentissent leurs activités.
Lille, Rennes et Toulouse
« Nous sommes confrontés à des problèmes très différents selon les villes. Par exemple, quand à Lille, le Camp de Saint-Sauveur a en parti brûlé, les camps de Toulouse deviennent des clusters du virus où se trouvent de nombreuses familles avec enfants.
À Rennes, alors que nous organisons des maraudes 3 fois par semaine, des personnes sans domicile fixe ont refusé toutes interactions sociales avec les associations. Une manière à eux de se confiner pour diminuer le risque de contamination. »
“Les maraudes sont apocalyptiques”
Des difficultés administratives
« La crise a entraîné des grandes modifications dans le quotidien de tous les secteurs, et celui des administrations n’a pas dérogé à la règle.
Par exemple les exilés à Paris qui veulent demander l’asile ne peuvent pas le faire : le service qui s’en charge en Île-de-France est en arrêt total avec la suspension des réceptions d’appels téléphoniques. Ils ne peuvent donc pas faire de demande d’asile ou d’aide et se retrouvent obligatoirement dans l’illégalité. »
Et après ?
« Au début de l’alerte, la majorité des personnes vivant dans la rue ont été placées dans des hôtels ou des gymnases. À la fin de la période de confinement obligatoire, ils devront retourner dans la rue (comme à la fin d’une trêve hivernale par exemple)… Ces personnes seront nombreuses, non testées et sortiront, pour certaines, de gymnases qui sont véritablement des nids de propagation. »
“On met à l’abri oui, mais pas en nombre suffisant ni dans des conditions décentes. Les gymnases sont des nids de propagation du virus »
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